Forum trans

Le forum I - TRANS - Transgenre et Transsexualité | Transidentité - Infos et Rencontres

Le forum trans - Transsexuelles, transsexuels, transgenres, hermas et autres humains de tous genres.


Entraide, droits civiques, droit à l' autodétermination sexuelle et rencontres

Nous sommes le 28 Mar 2024 13:00

Heures au format UTC [ Heure d’été ]




Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 6 messages ] 
Auteur Message
 Sujet du message: Un peu d'Histoire du Sud
Message non luPosté: 08 Nov 2016 06:25 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 29 Sep 2008 17:34
Messages: 951
Localisation: Constamment dans la lune
La Dépêche : Publié le 23/09/2016 à 07:30, Mis à jour le 23/09/2016 à 19:01


La communauté catholique de l'Ariège entame une démarche de pardon pour le massacre des cathares survenu au XIIIe siècle, au château de Montségur, dans le cadre du jubilé de l'année de la miséricorde lancé par le pape François.
Des plaies restées à vif depuis plus de huit siècles. Désormais, il s'agit de les panser. Dans le cadre du jubilé de la miséricorde initié par le pape François, la communauté catholique de l'Ariège a décidé d'entamer une démarche de pardon pour le drame des cathares survenu à Montségur au XIIIe siècle. Considérés comme des hérétiques, deux cents d'entre eux périrent sur un bûcher érigé sur le Prat del Cramats, aux alentours du château, le 16 mars 1244.

Des plaies restées à vif depuis plus de huit siècles. Désormais, il s'agit de les panser. Dans le cadre du jubilé de la miséricorde initié par le pape François, la communauté catholique de l'Ariège a décidé d'entamer une démarche de pardon pour le drame des cathares survenu à Montségur au XIIIe siècle. Considérés comme des hérétiques, deux cents d'entre eux périrent sur un bûcher érigé sur le Prat del Cramats, aux alentours du château, le 16 mars 1244.

Un pan de l'histoire régionale sur lequel l'Église catholique de l'Ariège croit bon de revenir à l'occasion d'une messe qui sera célébrée le 16 octobre prochain en l'église de Montségur. «C'est une démarche locale qui s'inscrit dans une autre qui est globale. Dans la tradition judaïque, le jubilé incite au pardon. Une sorte de remise à zéro des compteurs, explique le père Édouard de Laportalière, à l'évêché de Pamiers. De la même façon que le pape François a déjà demandé pardon aux Vaudois ou parlé de''génocide'' – un terme très fort – envers les peuples autochtones du Mexique, on s'est dit que c'était l'occasion de purifier la mémoire de l'histoire locale qui reste encore blessée. Mais il faut replacer tout ceci dans son contexte et arrêter avec une vision caricaturale et binaire des événements.»

Retour au XIIIe siècle. En pleine croisade des Albigeois, l'Église et la royauté font front commun pour faire disparaître cette frange dissidente du christianisme. D'une part, parce que les cathares sont déjà un symbole de liberté. Reniant le concept même du pouvoir, ils s'éloignent de Rome. D'autre part, ils refusent de se soumettre à la dîme royale. En outre, la pratique de leur religion n'est astreinte à aucun sacrement ou lieu de culte. «C'était très facile à vivre et le pouvoir, c'était le diable», confirme Michel Sabatier, adjoint au maire de Roquefixade, membre du groupe de recherches archéologiques de Montségur et spécialiste de la question en Ariège.

En effet, seuls les «Parfaits» sont intronisés comme prédicateurs au terme d'un parcours initiatique de deux ans. «Ils se considéraient comme les''vrais'' chrétiens, ceux des origines», poursuit Michel Sabatier. Qui est tout aussi partisan de la nuance que le père de Laportalière dans ce dossier vieux de plusieurs siècles : «Il y aura toujours des anticléricaux qui mettront ça sur le compte de l'Église mais il ne faut pas oublier que c'était, en réalité, une guerre de conquête des terres menée par les barons du Nord contre une Occitanie libre. Même s'il faut aussi arrêter d'idéaliser les cathares.» Et de les mythifier




Rappel: Premier génocide de l'Histoire de l'Europe

2) L’assaut de Béziers

Le 21 juillet 1209, l’armée catholique investit Béziers.

Les chroniqueurs de l’époque donnent une idée assez précise de la haine entretenue parmi ces croisés de la papauté et de la féodalité contre les habitants de Béziers ("hérétiques dépravés, voleurs, adultères, larrons...") et plus généralement contre les habitants du Midi occitan ( "ministres du diable", "satellites de Satan").

Les Croisés demandent que Béziers leur livre une liste de cathares. La ville refuse. Même les prêtres catholiques restent dans la ville assiégée plutôt que de suivre leur évêque auprès des assiégeants. "Ils décidèrent en commun, par serment, avec les hérétiques eux-mêmes, de défendre leur cité contre les croisés" (rapport des légats au pape).

L’assaut contre la ville est donné essentiellement par les "ribauds", très probablement des bandes de routiers, truands de sac et de corde, habitués au combat. Ils "tuèrent tous ceux qu’ils rencontrèrent" (Guillaume de Tudèle, poète). Ils "massacrent presque tous les habitants, du plus petit jusqu’au plus grand, et mettent le feu à la ville" (Pierre des Vaux de Cernay, moine croisé et historien).

3) Tuez-les tous ! Dieu reconnaîtra les siens

Cette phrase terrible aurait été prononcée par Arnaud-Amaury, abbé de Citeaux, légat du pape et chef de la croisade : "L’abbé, craignant tout autant que les autres, que certains ne feignent d’être catholiques par peur de la mort et ne retournent à l’erreur après le départ des croisés, répondit "Tuez-les, Dieu sait bien qui sont les siens. C’est ainsi qu’une quantité innombrable de gens furent tués dans cette ville." (Pierre Césaire dans le Dialogue des miracles)

Tous les témoignages concordent quant au carnage systématique des habitants de Béziers.

Guillaume de Puylaurens raconte l’assaut puis le massacre dans l’église Marie Madeleine : " Leurs murailles furent escaladées et prises. Ils cherchèrent asile dans les églises mais ils furent poursuivis jusque dans l’église de la Bienheureuse Marie-Madeleine, dont c’était la fête ce jour-là, et où plusieurs milliers d’entre eux furent massacrés." (Puylaurens, chapitre 18)

Guillaume le Breton, chapelain du roi de France Philippe Auguste nous apporte un récit concordant : "Les assiégeants pénètrent dans la ville et massacrent soixante mille personnes des deux sexes, que, sans l’assentiment des chefs, la fureur sans frein de la multitude et de ribauds, livra pêle-mêle à la mort, en égorgeant le fidèle avec le mécréant, et sans s’inquiéter de connaître qui était digne de vivre et qui méritait de mourir."

4) La vengeance divine a fait merveille

Le rapport envoyé au pape par ses légats ne diffère pas de ces deux témoignages : " Les nôtres, n’épargnant ni le rang, ni le sexe, ni l’âge, firent périr par l’épée, à peu près vingt mille personnes ; après un énorme massacre des ennemis, la cité tout entière a été pillée et brûlée. La vengeance divine a fait merveille"

Dans cette missive au pape apparaît la psychologie des croisés catholiques de l’époque lors de ce massacre de Béziers comme ailleurs dans le Midi :

* leur conviction qu’ils sont les armes de la vengeance divine : "La ville fut prise le jour de la fête de Sainte Marie-Madeleine. O très juste puissance de l’intervention divine ! Les hérétiques disaient que la bienheureuse Marie-Madeleine était la concubine du Christ ; c’est dans son église, en outre, que les habitants de Béziers avaient tué leur vicomte (en 1167) et cassé les dents à leur évêque. C’est donc justice que ces chiens très dégoûtants aient été pris et massacrés pendant la fête de celle sur qui ils professaient des choses outrageantes, et dont ils avaient souillé l’église du sang de leur vicomte et de leur évêque." (Pierre des Vaux de Cernay)

* leur conviction qu’ils vengent la féodalité affaiblie précédemment par la Commune de Béziers "Dieu avait exercé sa vengeance contre ceux qui avaient traîtreusement tué leur seigneur..." (Guillaume de Puylaurens)

5) La croisade catholique avait choisi, dès le départ, la terreur et les massacres systématiques comme stratégie

La "Chanson" nous informe de la décision prise au départ de la croisade : massacrer les habitants de toute ville qui ne voudrait pas se rendre. " Les barons de France et ceux des environs de Paris, les clercs et les laïques, tous et chacun convinrent entre eux, qu’en toute cité où l’ost se présenterait et qui ne voudrait pas se rendre, tout le monde, dès qu’elle serait prise, serait passé au fil de l’épée, et tué".

Aussi, dans cette même Chanson de la Croisade, le catholique Guillaume de Tudèle rend simplement compte de l’application de cette stratégie à Béziers, par exemple pour les 7000 habitants réfugiés dans un bâtiment religieux " Tous ceux qui s’étaient réfugiés dans le monastère furent tués ; rien ne put les sauver, ni croix, ni autel, ni crucifix ; les ribauds... tuèrent clercs, femmes et enfants ; je crois que pas un n’en réchappa. Dieu reçoive leur âme, s’il lui plaît, en son paradis ! Je ne pense pas que jamais, depuis le temps des Sarrazins, si sauvage massacre, ait été résolu et accompli..." (Chanson I p 58)

_________________
Nous vivons une civilisation,une époque, inspirées par la prééminence de l’émotionnel
«Des esprits étroits,sans aucune imagination et très intolérants.Les thèses déconnectées de la réalité,les termes vidés de leur sens,les idéaux usurpés,les systèmes rigides.Voilà ce qui me fait vraiment peur.»
"N'essaye pas de connaître le sens de la vie.Hormis celui que tu lui donnes il n'y en a pas."


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Un peu d'Histoire du Sud
Message non luPosté: 08 Nov 2016 17:23 
Hors ligne
Administratrice
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 12 Avr 2003 14:09
Messages: 5721
Localisation: Au pays des tielles et du mistral gagnant
Merci pour ce rappel que les fous de dieu et autres jihadistes massacrèrent aussi sous nos latitudes au nom d'un dieu d'amour et de paix
Béziers n'a pas de chance
"Brulez les tous dieu reconnaitra les sien" il y a quelques siècles et aujourd'hui un maire fada-fasciste.

_________________
«Ce qu'il y a de plus profond dans l'homme c'est la peau.» [ Paul Valéry ]
«Courage is contagious» [ Julian Assange - WikiLeaks ]
«L’homme ne doit pas tenter de dissiper l’ambiguïté de son être mais au contraire accepter de la réaliser.» [ Simone de Beauvoir ]


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Un peu d'Histoire du Sud
Message non luPosté: 19 Mai 2017 05:26 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 29 Sep 2008 17:34
Messages: 951
Localisation: Constamment dans la lune
Il faut le savoir, l'histoire de la ville de Béziers...

"La révolte des vignerons du Languedoc en 1907 désigne un vaste mouvement de manifestations survenu en 1907, dans le Languedoc et en pays catalan, contre le cabinet Clemenceau. C'est le fruit d'une grave crise viticole survenue au début du XXe siècle.
...

Ce mouvement est aussi appelé « révolte des gueux » du Midi. Il a été notamment marqué par la fraternisation du 17e régiment d'infanterie de ligne avec les manifestants, à Béziers

En 1907, la crise est là. Les viticulteurs languedociens s’estiment de plus en plus menacés et mettent en cause l'importation des vins d’Algérie qui arrivent par le port de Sète et la chaptalisation. « Depuis l'épidémie de phylloxéra, le pays n'avait pas connu une semblable misère. Il y avait trois ans qu'elle montait. Les vignerons tournaient dans leurs caves comme des fauves autour de leurs grilles. Les ouvriers sans travail promenaient par les rues leurs visages terreux. Des femmes aux chignons croulants montraient le poing au ciel. Les enfants pleuraient. Jamais la détresse humaine n'était apparue plus poignante que dans ce terroir d'abondance et de soleil ».
Chargement de vins dans le port d’Oran à destination de la France

Après la crise du phylloxéra, il faut du vin. Le vignoble de l'Île-de-France a disparu, seuls les vignobles méridionaux peuvent s'y substituer grâce aux chemins de fer. On n'hésite donc pas à « faire pisser la vigne »24. L'État favorise des importations et de l'afflux des vins d'Algérie qui servent au coupage des vins métropolitains médiocres. Cette pratique est lourde de conséquences et induit une surproduction qui est la véritable raison du marasme économique dans lequel s'englue la viticulture du Languedoc-Roussillon. Le port de Sète, outre son rôle d'entrepositaire, va jouer celui de catalyseur de la crise. Sa présence au centre d'une grande zone de production, y induit les risques de surproduction en encourageant les plantations d'aramons et des conduites de la vigne en taille longue. Il faut du volume. Le coupage nécessaire de ces petits vins pour en augmenter le degré, provoque une demande accrue des vins algériens dont la production passe de 5 000 000 d'hectolitres en 1900 à 8 000 000 en 1904.

Séte, port d'arrivée des vins d'Algérie

Débarquement des vins d'Algérie sous contrôle douanier

Ces fortes productions locales, jointes à l'élaboration de vins factices et à l'importance des coupages avec des vins d’Algérie saturent le marché de consommation. L'importation des vins, loin de diminuer, augmente en 1907, aggravant le déséquilibre entre l'offre et la demande. Ce qui génère la chute des cours et de la crise économique.

Dès janvier 1907 est tirée une sonnette d'alarme par un rapport diffusé par la Revue de la Société des Viticulteurs de France : « Le sucrage des vendanges n'a été autorisé par la loi qu'en vue de la chaptalisation, c'est-à-dire comme moyen d'améliorer la qualité du vin, et non comme un procédé propre à en augmenter la quantité à l'aide du mouillage. Il est donc légitime d'établir un impôt proportionnel sur le produit naturel ainsi amélioré. Les associations viticoles et le Comité d’œnologie ont depuis longtemps, émis l'avis que toute réglementation du sucrage des vendanges devait avoir pour corollaire une taxe sur les sucres employés dans les vendanges ».

Le mouvement s'accélère et gagne en ampleur. Tous les dimanches, des rassemblements et des manifestations sont organisés. Ils mobilisent de dizaines de milliers de personnes et vont s'amplifier jusqu'au 9 juin 1907.

Le 31 mars, ce sont cinq à six cent manifestants qui se retrouvent à Bize-Minervois. Le 7 avril, le rassemblement d'Ouveillan, réunit 1000 personnes. Celui du 14 avril mobilise plus de 5000 manifestants à Coursan33,30

Le 21 avril, dix à quinze mille viticulteurs se retrouvent à Capestang. Ce dimanche a lieu la publication du premier numéro du Tocsin édité par le comité d’Argeliers. C'est un hebdomadaire dont Marcelin Albert assume la direction et Louis Blanc la rédaction. Ce numéro contient une adresse au parlement afin que soit votée une loi contre la fraude30. Une semaine plus tard, le 28 avril, le rassemblement à Lézignan-Corbières, réunit entre 20 et 25 000 personnes ;

Le mois de mai va être celui des grands rassemblements dans les préfectures et sous-préfectures du Languedoc-Roussillon. Le premier a lieu à Narbonne où, le 5 mai, un rassemblement mobilise entre 80 et 100 000 personnes. Le maire, Ernest Ferroul, prend position pour la lutte des viticulteurs du Midi et stigmatise l'État : « Voici longtemps que vous faites crédit à l’État. L'heure est venue où la dette envers vous doit être payée ». Tous les comités de défense viticoles des quatre départements se fédèrent et adoptent le serment des fédérés : « Constitués en comité de salut public pour la défense de la viticulture, nous nous jurons tous de nous unir pour la défense viticole, nous la défendrons par tous les moyens. Celui ou ceux qui, par intérêt particulier, par ambition ou par esprit politique, porteraient préjudice à la motion première et, par ce fait, nous mettraient dans l'impossibilité d'obtenir gain de cause seront jugés, condamnés et exécutés séance tenante ». Les discours séparatistes prononcés en occitan inquiètent le gouvernement.

Le 12 mai, le rassemblement de Béziers voit 150 000 manifestants envahir les allées Paul Riquet et le Champ-de-Mars. Les slogans des banderoles affirment : La victoire ou la mort !, Assez de parole, des actes, Mort aux fraudeurs, Du pain ou la mort, Vivre en travaillant ou mourir en combattant, « Abèré tant de boun bi et pas pourré mangea de pan ! » (Avoir tant de bon vin et pas pouvoir manger du pain). Les manifestants, qui venaient de plus de 200 communes, ont été rejoints par de nombreux employés et commerçants biterrois. La manifestation est clôturée par les discours prononcés sur la place de la Citadelle, aujourd'hui Jean-Jaurès. Prennent la parole Marcelin Albert qui lance un ultimatum au gouvernement en lui demandant de relever le cours du vin, Ernest Ferroul qui fixe cet ultimatum au 10 juin et prône la grève de l’impôt : « Si d'ici le 10 juin, le gouvernement n'a pas trouvé de solution à la crise alors, ce sera la démission des mairies du Midi ! Ce sera la grève de l'impôt ! » et le maire de Béziers, Émile Suchon, proche de Clemenceau, qui prend position pour les viticulteurs en lutte. Il y eut quelques incidents légers lors de l'appel à la dispersion des manifestants.

Le 26 mai, 220 à 250 000 personnes manifestent à Carcassonne. Dès l’avenue de la gare, ils passent sous un arc de triomphe où est inscrit « Salut à nos frères de misère ». Les discours du rassemblement tentent de canaliser le ton révolutionnaire (slogans, revendications) vers le passé cathare des Occitans que Ferroul et Albert évoquent tour à tour. Marcelin Albert fait dans le lyrique : « Les albigeois étaient autrefois réunis sous ces murs, ils y tombèrent pour la défense de leur liberté. Nous ferons comme eux ! En avant pour la défense de nos droits ! Le Midi le veut, le Midi l'aura ! », Ernest Ferroul, en grand tribun, joue sur l'opposition séculaire du Nord et du Sud : « Un souvenir me hante, souvenir de misère pareille à la vôtre ! Lorsque les barons féodaux envahissaient le Midi et le saccageaient, un troubadour pleurait ainsi : Ah ! Toulouse et Provence, et la terre d'Argence, Béziers et Carcassonne, qui vous a vu et qui vous voit ! Depuis, les barons de l'industrie du Nord nous ont envahis et ruinés. Nous ne voulons pas les supporter davantage. En avant ! Debout pour les repousser, eux et leurs complices. Parlez plus fort, unissez vos voix, votre prière prendra le ton d'un commandement ».

La date du 9 juin 1907, avec le gigantesque rassemblement de Montpellier va marquer l'apogée de la contestation vigneronne dans le Midi de la France. La place de la Comédie est envahie par une foule estimée entre 600 à 800 000 personnes. « En 1907, le bas Languedoc compte environ un million d'habitants. Cela signifie qu'un Languedocien sur deux manifeste. Cette mobilisation de masse dépasse d'ailleurs les courants politiques ou idéologiques, puisque l'on voit marcher côte à côte des sympathisants de la gauche socialiste et de la droite royaliste ».

C'est la plus grande manifestation de la troisième République. Dans son discours, Ernest Ferroul, en tant que maire de Narbonne appelle à la démission de tous ses collègues du Languedoc-Roussillon. Il prône ouvertement la désobéissance civique. Quant à Marcelin Albert, il prononce un tel discours que le journaliste du Figaro en fut bouleversé et écrivit : « C’était fou, sublime, terrifiant ».

La révolte vigneronne reçoit l'aval de toutes les tendances politiques. Des royalistes aux radicaux, tous soutiennent activement le mouvement. Tout le Languedoc est ligué contre Clemenceau, président du Conseil. L'Église catholique ouvre même les portes de sa cathédrale et de ses églises. Un communiqué de l'évêque Anatole de Cabrières, fait savoir qu'y seront accueillis pour y passer la nuit les femmes, les enfants et les viticulteurs grévistes.

Jusqu'alors, les manifestations dominicales s'étaient déroulées dans le calme et la discipline. Elles se voulaient pacifiques. Mais Clemenceau jugea que force devait rester à la loi et pour rétablir l'ordre fit appel à l'armée. Depuis le 17 juin, 22 régiments d’infanterie et 12 régiments de cavalerie occupaient tout le Midi, soit 25 000 fantassins et 8 000 cavaliers. La gendarmerie reçut alors ordre d’incarcérer les responsables des manifestations. Albert Sarraut refusa de cautionner cette politique et démissionna du gouvernement.

Le 19 juin, Ernest Ferroul est arrêté au petit matin à son domicile à Narbonne par les militaires du 139e régiment d'infanterie, et emprisonné à Montpellier. Trois autres membres du comité de défense viticole se livrent aux gendarmes à Argeliers. La nouvelle de l'arrestation programmée de tous les membres du Comité d'Argeliers met le feu aux poudres.
Barricades à Narbonne devant l'Hôtel de Ville


La répression

La foule entrave la progression des gendarmes en se couchant par terre. Narbonne est en état de siège, une manifestation spontanée se crée qui réclame la libération des membres du Comité et crie à la vengeance. Des incidents éclatent durant toute la journée, la sous-préfecture est prise d'assaut, des barricades barrent les rues. Le soir, dans la confusion générale, la cavalerie tire sur la foule. Il y a deux morts, dont un adolescent de 14 ans,. Marcelin Albert, qui n'a pas été arrêté, est caché dans le clocher d'Argeliers. Un nouveau comité de défense clandestin est aussitôt formé. Louis Blanc en assume la direction.

Dans les départements du Gard, de l'Hérault, de l'Aude et des Pyrénées-Orientales, les conseils municipaux démissionnent collectivement - il y en aura jusqu'à 600 - certains appellent à la grève de l'impôt. La situation devient de plus en plus tendue, les viticulteurs furieux attaquent perceptions, préfectures et sous-préfectures.


Les mutins du 17e

Le 17e régiment d'infanterie de ligne composé de réservistes et de conscrits du pays, avait été muté de Béziers à Agde le 18 juin 1907. Le soir du 20 juin, apprenant la fusillade, environ 500 soldats de la 6e compagnie du 17e régiment se mutinent, ils pillent l’armurerie et prennent la direction de Béziers.

Ils parcourent une vingtaine de kilomètres en marche de nuit. Le 21 juin, en début de matinée, ils arrivent en ville. Accueillis chaleureusement par les Biterrois, « ils fraternisent avec les manifestants, occupent les allées Paul Riquet et s'opposent pacifiquement aux forces armées en place ». Les soldats s'installent alors sur les Allées Paul Riquet, mettent crosse en l’air. La population leur offre vin et nourriture.

Le Midi est au bord de l'insurrection. À Paulhan, la voie ferrée est mise hors service par des manifestants qui stoppent ainsi un convoi militaire chargé de mater les mutins. À Lodève, le sous-préfet est pris en otage30. Les autorités militaires ne peuvent accepter cette mutinerie. L'exemple du 17e régiment peut donner des idées similaires à d'autres régiments de la région.

À Paris, la République tremble, Clemenceau doit faire face à un vote de défiance. Il joue son va-tout en intimant au commandement militaire de chasser les mutins dans la journée. Il y a négociation, et dans l’après-midi, après avoir obtenu la garantie qu’aucune sanction ne leur sera infligée, les soldats du 17e déposent les armes et se dirigent vers la gare sous bonne escorte et sans aucun incident majeur. Le 22 juin, par train, ils regagnent leur caserne agathoise. Clemenceau annonce la fin de la mutinerie et obtient la confiance au gouvernement par 327 voix contre 223. Le 23 juin une loi est enfin votée, qui réprime la chaptalisation massive des vins.
17e régiment d'infanterie de ligne à Gafsa

La négociation et l’ampleur du mouvement permettent d’éviter une punition collective : les mutins du 17e sont affectés à Gafsa (Tunisie), lieu de cantonnement de compagnies disciplinaires ; mais ils restent en dehors de ce cadre, sous un statut militaire ordinaire. Il n'y eut donc pas de sanctions pénales à la révolte du 17e, contrairement à la légende qui courut à ce sujet. Cependant, durant la Première Guerre mondiale, poursuivis par leur réputation de déserteurs, ils furent nombreux à être envoyés en première ligne notamment dans les assauts sanglants de 1914. C'est à la suite de ces événements que les conscrits effectueront leur service militaire loin de chez eux. (Et de façon générale, la majorité des fonctionnaires)

La mutinerie des soldats du 17e est restée célèbre notamment par les paroles de la chanson de Montéhus Gloire au 17e, dont le refrain clame : « Salut, salut à vous, Braves soldats du dix-septième... ».

Georges Clemenceau était assez homme d'État pour analyser la situation. La mobilisation du Midi viticole et la mutinerie du 17e qui lui a fait suite étaient inquiétantes. La révolte s'amplifiait chaque semaine et menaçait de gagner d'autres régions viticoles. La solidarité des élus locaux et nationaux menaçait de saper la majorité gouvernementale. Mais le plus inquiétant restait la mutinerie des soldats. Les gouvernements de la troisième république utilisaient l'armée pour faire régner l'ordre social, le refus de la troupe de réprimer menaçait le pouvoir laissé sans protection armée face à une classe ouvrière et une paysannerie mobilisées."

_________________
Nous vivons une civilisation,une époque, inspirées par la prééminence de l’émotionnel
«Des esprits étroits,sans aucune imagination et très intolérants.Les thèses déconnectées de la réalité,les termes vidés de leur sens,les idéaux usurpés,les systèmes rigides.Voilà ce qui me fait vraiment peur.»
"N'essaye pas de connaître le sens de la vie.Hormis celui que tu lui donnes il n'y en a pas."


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Un peu d'Histoire du Sud
Message non luPosté: 19 Mai 2017 05:49 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 29 Sep 2008 17:34
Messages: 951
Localisation: Constamment dans la lune

youtu.be/2uIcw5piBr0

Un país que vòl viure
Es lo ciprès quilhat
La Corbièra salada
Es lo vilatge mòrt, la tèrra abandonada.

Vos vau parlar d'un país que vòl viure,
Vos vau parlar d'un país que morís.
La tèrra la coneissetz,
es la vòstra, amics,
es la teuna, vinhairon (bis)

Tu me disiás ma maire :
"Ont vas viure, mon filh ?".
Tu me disiás ma maire :
"N'i a tant que son partits".
E Marcelin Albert,
E la Comuna de Narbona,
E los qu'an tuat los crosats.
E Marcelin Albert,
E la Comuna de Narbona,
Totes los qu'an cantat "libertat".

Vos vau parlar d'un país que vòl viure
Vos vau parlar d'un país que morís.
La tèrra, la coneissetz,
es la vòstra, amics,
es la teuna, vinhairon (bis).

Ma maire me rementi de tot çò que disiás.
Vòli cantar lo vent que parla en lenga d'òc.
E Marcelin Albert,
E la Comuna de Narbona,
E los qu'an tuat los crosats.
E Marcelin Albert,
E la Comuna de Narbona,
Totes los qu'an cridat "libertat".

Vos ai parlat d'un país que vòl viure. (bis)
[/i]



traduction en français



Le pays qui veut vivre
C'est le cyprès dressé,
La Corbière salée,
C'est le village mort, la terre abandonnée.

Je vais vous parler d’un pays qui veut vivre,
Je vais vous parler d’un pays qui meurt.
La terre vous la connaissez,
C’est la vôtre amis,
C’est la tienne, vigneron. (bis)

Tu me disais ma mère
“Où vas-tu vivre mon fils?”
Tu me disais ma mère
“Ils y en a tant qui sont partis”,
Et Marcelin Albert
Et la Commune de Narbonne
Et ceux qu’ont tué les croisés
Et Marcelin Albert
Et la Commune de Narbonne
Tous ceux qui ont chanté "Liberté!".

Je vais vous parler d’un pays qui veut vivre,
Je vais vous parler d’un pays qui meurt.
La terre vous la connaissez,
C’est la vôtre amis,
C’est la tienne, vigneron. (bis)

Ma mère, je me souviens de tout ce que tu me disais,
Je veux chanter le vent qui parle en langue d’Oc,
Et Marcelin Albert
Et la Commune de Narbonne
Et ceux qu’ont tué les croisés
Et Marcelin Albert
Et la Commune de Narbonne
Tous ceux qui ont crié "Liberté!".

Je vous ai parlé d’un pays qui veut vivre. (bis)

_________________
Nous vivons une civilisation,une époque, inspirées par la prééminence de l’émotionnel
«Des esprits étroits,sans aucune imagination et très intolérants.Les thèses déconnectées de la réalité,les termes vidés de leur sens,les idéaux usurpés,les systèmes rigides.Voilà ce qui me fait vraiment peur.»
"N'essaye pas de connaître le sens de la vie.Hormis celui que tu lui donnes il n'y en a pas."


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Un peu d'Histoire du Sud
Message non luPosté: 19 Mai 2017 17:51 
Hors ligne
Administratrice
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 12 Avr 2003 14:09
Messages: 5721
Localisation: Au pays des tielles et du mistral gagnant
Merci pour ces pages d'Histoire :)

_________________
«Ce qu'il y a de plus profond dans l'homme c'est la peau.» [ Paul Valéry ]
«Courage is contagious» [ Julian Assange - WikiLeaks ]
«L’homme ne doit pas tenter de dissiper l’ambiguïté de son être mais au contraire accepter de la réaliser.» [ Simone de Beauvoir ]


Haut
 Profil  
 
 Sujet du message: Re: Un peu d'Histoire du Sud
Message non luPosté: 21 Mai 2017 12:40 
Hors ligne
Avatar de l’utilisateur

Inscription: 29 Sep 2008 17:34
Messages: 951
Localisation: Constamment dans la lune
Ce qu'il y a d' intéressant dans cette affaire c'est la position très caractéristique de Clémenceau. Il incarne, on le sait, les limites du socialisme au pouvoir. Dans son for intérieur il est sans ambiguïté socialiste, mais il est conscient que pour faire évoluer et débloquer les situations, il n'a, malgré lui, et dans son pragmatisme, que la police et l'armée à sa disposition. Pour beaucoup de "petits" de son époque, il est avant tout un "briseur de grève".

_________________
Nous vivons une civilisation,une époque, inspirées par la prééminence de l’émotionnel
«Des esprits étroits,sans aucune imagination et très intolérants.Les thèses déconnectées de la réalité,les termes vidés de leur sens,les idéaux usurpés,les systèmes rigides.Voilà ce qui me fait vraiment peur.»
"N'essaye pas de connaître le sens de la vie.Hormis celui que tu lui donnes il n'y en a pas."


Haut
 Profil  
 
Afficher les messages postés depuis:  Trier par  
Poster un nouveau sujet Répondre au sujet  [ 6 messages ] 

Heures au format UTC [ Heure d’été ]


Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum: Aucun utilisateur enregistré et 10 invités


Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets
Vous ne pouvez pas éditer vos messages
Vous ne pouvez pas supprimer vos messages

Développé par phpBB® Forum Software © phpBB Group
Traduction par phpBB-fr.com