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 Sujet du message: Textes de Linda
Message non luPosté: 09 Juil 2010 12:24 
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Inscription: 01 Juil 2010 12:55
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Bon, puisque vous aimez ça, je vous en fourgue encore un. N'hésitez pas à me faire part de vos critiques et appréciations... Merci de votre éventuelle lecture...

Une marche d’indépendance

Les yeux mi-clos, je récapitule les prévisions de la journée: un premier rendez-vous, là-bas, presqu’au bout de la ville. Le guide des rues se déploie doucement dans ma tête, les pages se tournent tout au long d’un itinéraire infini. Mon corps lourdement engoncé me dissuade d’extraire mes pieds hors de la couette.

Plutôt que de les user sur les trottoirs citadins, je les dirigerai jusqu’au premier arrêt des transports en commun. Après avoir payé mon ticket, il ne me restera plus qu’à me laisser porter par le tram. Le bruit de la pluie, d’abord subreptice, crépite maintenant sur le velux de la chambre. Ouvrant les paupières sous un ciel lourd de menaces, j’enfouis ma tête sous l’oreiller pour mieux m’imaginer, le bas du pantalon trempé, trépigner sous un abribus. Le regard alternant de l’horaire à la montre, désespérant qu’un véhicule veuille bien pointer le bout de son nez. Puis, assise sur un siège trop étroit, tentant de réajuster ma coiffure dans le reflet ténu de la vitre. En surimpression des façades qui défilent, je distingue les traits flous de mon visage pour repérer ceux d’un autre passager qui me reluque, lui, avec précision. Je me retourne tandis qu’il se détourne sur un enchevêtrement d’écoliers survoltés, entre des mères qui tentent de frayer une place à leurs landaus parmi des navetteurs toujours plus énervés. Alors qu’un cahot déstabilise un talon qui m’écrase lourdement les orteils, je me lasse de ce fichu tortillard qui louvoie lentement sur cet itinéraire biscornu. Je m’agite sur mon matelas: pour sûr, je risque d’arriver en retard.

Sur ma table de nuit, les chiffres lumineux indiquent une heure toujours trop matinale. Je referme les yeux au jour naissant pour les rouvrir sur la main d’un concessionnaire qui, tout sourire, me tend les clés d’une auto rutilante. Que n’y ais-je pas pensé plus tôt? Je me précipite pour m‘asseoir, confortablement, dans une voiture que je ne devrai jamais plus attendre. Avant d’enclencher le contact, je savoure le doux chuintement de la radio. Le moteur vrombit de plaisir alors qu’il étrenne ses premiers kilomètres. Et lorsque je butte sur un embouteillage, j’en profite, à l’abris de toute indiscrétion, pour me remaquiller en visionnant, clairement, mon visage dans le rétroviseur. L’harmonie musicale fait place à l’info: crise financière, réchauffement climatique, menace d’attentat terroriste. J’avance de quelques mètres tandis que les infos-trafic égrènent leur chapelet d’encombrements quotidiens. Impatientée, je grille une cigarette que je n’aurais jamais pu allumer dans les transports en commun et, l’attention voilée par la fumée, je ne remarque guère les émanations vaporeuses qui s’échappent bientôt du moteur en surchauffe. Ma sueur se refroidit, brusquement, lorsque qu’un garagiste me tend sa facture: et si mon patron me virait à cause de mon absence impromptue? Je ne pourrais plus payer ni l’essence, ni l’entretien, ni l’assurance, ni les traites de la bagnole.

Le cri du réveil, ravageur, me tire de mon sommeil. L’esprit embué, je consulte d’emblée mon carnet d’adresses. Sans risque pour mes fins de mois, je recherche une bonne âme motorisée pour me tirer d’affaire et, épuisant mon crédit téléphonique, découvrir que je n’ai pas d’amis. J’enfile mon parka et je saisis mon parapluie pour m’élancer à l’extérieur, hors de moi. Le reflet du soleil sur les pavés luisants m’incite à poser un pied averti. Additionnant les pas, la douceur matinale rafraîchit mon visage. En m’arrêtant pour siroter un café et déguster un croissant, je me demande pourquoi je ne me promène qu’en vacances. Sans risque d’être retardée, je déambule au travers des quartiers. Je n’use, finalement, que mes semelles et quand je porte mes chaussures chez le cordonnier, je lui en parle comme Calamity Jane vante son canasson. Lui me montre des cadres accrochés aux murs de son magasin: lors de son temps libre, avec du cirage, il peint la beauté de la vie.

Texte: Linda Mondry

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Marche, où crève. https://laguenon.wordpress.com/


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