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 Sujet du message: Audace d'exister
Message non luPosté: 09 Juil 2010 14:35 
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Inscription: 01 Juil 2010 12:55
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Localisation: Rochefort
Bon je vous remet çui là, vu que c'est un qui plaît bien. Et puis, je l'aime bien aussi passque parfois, il peut être utile...
Si un jour vous voulez faire quelque chose avec, je suis pas contre. mais informez moi. J'aime bien savoir à quoi sert mon travail et, si possible avoir des retours. Bien entendu, n'oubliez pas qu'ils sont sous droits d'auteurs...

L’audace d’exister

Je dispose les côtes d’agneau fraîches sur la poêle brûlante. Un grésillement vif se mêle à celui des pommes de terres sautées. J’arrose de vinaigrette des feuilles de salades croquantes posées sur mon assiette, avant d’y coucher les morceaux d’une viande délicatement rosée. Je trempe mes lèvres dans un verre de vin blanc frais, j’avale les premières bouchées d’un repas sélectionné. Il y a des jours où la vie semble véritablement se dérouler comme un tapis rouge. Et puis d’autres où je n’arrive pas même à aligner les premiers mots d’un texte. Depuis le matin je tourne en rond, changeant de lieu en espérant y dénicher, dans chacun d’entre eux, l’inspiration. Je ne la trouve nulle part, ni sous les coussins des divans, ni dans les géraniums du jardin. Honnêtement, ce repas soigneusement mitonné n’existe que dans mon imaginaire. Seule demeure la bouteille de blanc sec, espagnol, que je viens de me procurer en errant dans les rues du quartier. Pas mauvais, tout de même. Mais à force de trop vouloir composer son menu…

J’aurais voulu écrire sur le réchauffement climatique et ces migrants dont on voit les images dans les médias. Qu’on découvre échoués, parfois vifs ou parfois morts, sur les plages méditerranéennes. Sur le crack boursier et la fin de l’illusion néolibérale. Sur l’absurdité de la course à la productivité et les limites du matérialisme. Sur les églises qui se vident face à un clergé souvent désemparé et la fin de la domination occidentale sur le monde. Sur ce siècle, déstabilisant, qui nous forcera tôt ou (trop?) tard à nous changer. A quitter le confort des certitudes pour nous réinventer. Mais a-t-on du mérite à enfoncer des portes ouvertes? A rabâcher des vérités, aussi difficiles soient-elles à admettre, que tout le monde connait déjà? Des spectateurs admirent-ils un trapéziste qui descend de son mât pour exposer, en théorie, l’art du lâcher prise? S’il ne s’élance pas dans la peur et ne réalise pas une formidable pirouette, de préférence sans filet, pour reprendre pied à l’autre extrémité du cirque, le chapiteau ne vibrera jamais sous un tonnerre d’applaudissements. L’artiste n’aura plus qu’à regagner sa roulotte pour, en se démaquillant, contempler sa lâcheté dans un miroir. Comment, sans audace, sauter dans le vide et susciter l’admiration?

Je retrempe mes lèvres dans mon verre, comme une condamnée fume sa dernière cigarette. Petite, j’ai préféré baisser les yeux et porter le poids de la culpabilité. Ne pas dénoncer le crime de peur d’être rejetée par ma famille. J’ai préféré me noyer dans la honte et, surtout, ne jamais refaire surface. Grandissant hors de moi-même et de ma vérité, tentant d’ajuster mes gestes aux exigences de mon entourage. Etrangère à ma vie, aveugle à ma destinée. Comme guidée par les fils d’un cruel marionnettiste qui prolongerait indéfiniment le spectacle. Jamais je ne suis entrée dans ma roulotte pour me débarbouiller: j’espérais que le miroir se couvre définitivement de poussières. Privée de reflets, je n’ai pas vu mon public se clairsemer, mon chapiteau s’user par la force du temps, le vent souffler à travers la toile déchirée. Quand mon cirque a menacé de s’effondrer, j’ai ouvert les yeux sur des travées de sièges inhospitaliers pour pleurer ma solitude. Celle d’une enfant violée qui croyait, à tout jamais, son innocence perdue.

Je sors de l’arène pour traverser la nuit à la lueur de la lune et des étoiles. Je découvre que seule, sans public, j’arrive aussi à me diriger. Pas à pas, les secondes me rapprochent de l’aube où le soleil ranime les couleurs. Observant des multitudes d’insectes et la diversité des chants d’oiseaux, je découvre ma liberté d‘exister. Quand un ami pénètre dans la pièce, je savoure une dernière gorgée de vin: « Alors, puce! Tu l’as pondu ton texte? » En lui versant un verre, je retrouve l’appétit de vivre: « Oui. Je vais, enfin, pouvoir aller manger. »

Texte: Linda Mondry

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Marche, où crève. https://laguenon.wordpress.com/


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